Pour le ministre de la reconstruction japonais les « auto-évacués » sont responsables de leur sort.
Harcelé de questions à propos des « auto-évacués », ou « évacués volontaires » qui viennent de perdre leur aide au logement,
le ministre de la reconstruction, Masahiro Imamura, s’est mis en colère
et a chassé un journaliste lors d’une conférence de presse : « sortez
et ne revenez jamais ». Les japonisants peuvent regarder
cette vidéo par exemple qui montre l’extrait de la conférence de presse du 4 avril dernier.
Au 31 mars, 26 000 « auto-évacués », qui
ont quitté leur domicile à cause de la pollution radioactive sans en
avoir reçu l’ordre, ont perdu la seule aide qui leur restait, à savoir
un logement gratuit. Durant la conférence de presse, le ministre a
expliqué que les « auto-évacués » étaient responsables de leur décision
quant à leur retour ou leur relogement. Et que si la politique
gouvernementale ne leur plaisait pas, ils pouvaient porter plainte. Ils
étaient beaucoup plus nombreux au début de la catastrophe nucléaire.
Le ministre s’est ensuite excusé de
s’être emporté, mais a expliqué qu’il maintenait ses propos, qui étaient
un « fait objectif ». C’est, en tout cas, conforme à la politique
gouvernementale, pour qui la pollution est sans danger et qu’il n’y a
que des « rumeurs néfastes ».
L’opposition a immédiatement demandé la
démission du ministre de la reconstruction, qui veut rester à son poste.
Des évacués sont en colère. Certains ont rappelé que la justice vient
de condamner l’Etat et TEPCo pour négligences.
Le lendemain de la conférence de presse, une vingtaine d’entre eux ont
manifesté devant le ministère pour demander la démission du ministre.
Le premier ministre a maintenu son
ministre de la reconstruction qui a dû s’excuser à nouveau : « je
regrette d’avoir donné l’impression que les évacués sont responsables de
leur retour alors qu’ils sont déplacés à cause de la catastrophe
nucléaire et je présente mes excuses ». Le 7 avril, il a aussi dit
regretter « l’incompréhension » et retirer sa remarque. Tout le monde
avait bien compris ! Et dès le lendemain, le premier ministre Abe s’est
rendu à Fukushima avec le ministre de la reconstruction pour lui
affirmer son soutien. Il a dit soutenir la lutte de Fukushima contre les
« rumeurs néfastes »… Son discours est toujours aussi creux car sa
seule préoccupation, c’est la reconquête, par les populations.
Cet épisode montre, une fois de plus, le
décalage entre la politique gouvernementale et les besoins des
populations affectées par les retombées radioactives.
Rappelons que la limite d’évacuation
fixée par le gouvernement est la moins protectrice des recommandations
internationale : 20 mSv/an correspond à la limite pour les travailleurs
et elle est appliquée aux enfants les plus jeunes, qui sont plus
sensibles aux radiations. Il est donc légitime que des familles
n’acceptent pas cette politique et les enfants doivent être mieux
protégés.
Ce même ministre s’était illustré, en janvier dernier, en comparant la reconquête des territoires contaminés à un marathon,
ajoutant que 30 km avaient déjà été parcourus. Ces propos avaient déjà
provoqué l’ire des élus locaux et des habitants car certains territoires
n’ont même pas franchi la ligne de départ.
En mars, il a affirmé, sur une chaine de
télévision qu’il était « facile de quitter sa maison et qu’il espérant
que les évacués vont montrer leur volonté de rentrer et de rester ». Peu
sont rentrés pour le moment.
Merci à l'ACROnique de Fukushima pour cet article